Impossible de parler de Barrès sans susciter des réactions passionnées. "Condottiere de salon" ou "maître de liberté" ? Compliments et insultes s'équilibrent. Les uns fustigent son "dilettantisme satisfait", sa "grandiloquence effrénée". Les autres assurent qu'"il a connu la grandeur de vivre" et s'enivrent de la "prodigieuse musique", de la "musique de perdition" de son style. Le Roman de l'énergie nationale est tantôt qualifié de "pièce de musée", tantôt de "document politique et social incomparable". Les Déracinés ? "Ouvrage raboteux, abstrait, désolément réactionnaire", selon certains critiques. "Un livre d'aujourd'hui", affirment d'autres.
Quelle conclusion tirer de ces jugements contradictoires, tous émis par d'éminents contemporains ? Que Barrès "nous concerne encore avec son génie et sa sottise", comme le dit l'un d'eux, qu'il est "invisible et présent" à la fois, que son influence est immense quoique diffuse, et sa descendance nombreuse : Aragon et Malraux, Proust et Gide, Giraudoux et Giono, Mauriac, Montherlant et Jouhandeau ont subi son ascendant. Et combien d'autres ! Voici les grands textes de l'un des fondateurs de la littérature du XXe siècle.
Robert Kopp.