Le Tractatus de amore d'André le Chapelain, composé vers la fin du XIIe siècle, est un ouvrage capital pour l'histoire de l'amour courtois. Codifiant doctrinalement les règles de l'art d'aimer, il constitue aussi un véritable bréviaire du savoir-vivre aristocratique qui définit l'honnête homme et l'honnête femme de l'époque.
Son auteur, un clerc intimement mêlé à la vie de la cour de Marguerite de Champagne, la célèbre inspiratrice de Chrétien de Troyes, prodigue d'abord à son disciple Gautier, les conseils les plus avertis dans la difficile technique de la conquête amoureuse, mais finalement, en un brusque retournement, il dénonce, avec la véhémence d'un sermonnaire, les méfaits de l'amour et accable d'opprobres la femme pourvue de tous les vices.
Ainsi cohabitent dans cet ouvrage didactique les deux aspects d'une éthique que les critiques modernes ont trop tendance à dissocier ; la veine courtoise, idéalisant la femme, y conflue avec la veine anti-féministe, alimentée par une déjà longue tradition.