Le Wenzi se présente comme un traité de bon gouvernement à l'usage des sages souverains. Mais, comme tous les traités de science politique de la Chine ancienne, il est aussi une réflexion sur le Tao et un manuel de culture de soi. En effet, en vertu de la théorie de la résonance, propre à cette pensée cosmologique, il existe une intime correspondance entre le ciel, le corps et la société. Aussi le Sage qui a appréhendé le Principe dans son essence, est capable d'harmoniser ses souffles et, à travers la régulation de ses organes internes et du principe vital, d’assurer l’ordre dans l’État.
Profondément influencé par le Livre de la Voie et de la Vertu dont il se veut une sorte de commentaire, mais un commentaire qui en fournirait les applications pratiques, le Wenzi reprend les notions de vide, de non-agir, d’unicité, et fait sien le postulat de la prééminence du Non-être sur l’Être pour leur conférer un tour nettement politique et tenter de fournir une assise métaphysique, voire ontologique à l’empire centralisé et unifié en train de se mettre en place. Non seulement le Wenzi reprend les thèmes du Laozi, mais encore il en adopte le rythme et le vocabulaire, notamment les accents inspirés et mystiques. En même temps, il ne laisse pas d’inquiéter, dès lors que l’on garde à l’esprit qu’il s’agit de justifier par le fonctionnement naturel des choses un ordre qui n’a rien de naturel et serait plutôt totalitaire. Il demeure en tout cas un document précieux et irremplaçable pour comprendre, de l’intérieur, le fonctionnement du régime impérial et retracer les étapes de l’élaboration de sa justification idéologique.