Hanno Hardt, grand spécialiste américain de la communication et photographe de renom, collectionne depuis trente ans, dans l'ancien bloc communiste, des photographies de graffiti apposés sur des murs — des murs simples et banals, délités ou tenaces, que les gens transforment en un support éloquent pour exprimer leur enthousiasme ou leur opposition envers une vie meilleure — l'arrivée libératrice du communisme en Yougoslavie et son effondrement angoissé en Allemagne de l'Est. Il a choisi ces deux pays opposés au sein même de leur destin communiste pour révéler comment des graffiti constituent une expérience de rhétorique populaire.
En supplément des archives officielles, des documents écrits et des narrations convenues, les graffiti proposent un autre répertoire rhétorique concernant la prise du pouvoir (Yougoslavie) et la chute du pouvoir (RDA). Ils sont la manifestation d'un mode expressif lié au pouvoir conjoint de l'image et du mot, l'une et l'autre saisis par le vif du sujet — le sujet politique pris lui-même dans des bouleversements historiques, qui n'a pour exprimer sa présence au monde que l'inscription sauvage, le trait rapide, la figure rhétorique du graffiti.