À l'Hôtel de Rambouillet, un curieux petit homme fait admirer son esprit, sa pétulance et le tour galant de ses vers. Le « Nain de la Princesse Julie », poète mondain rival de Voiture et critique pertinent de Malherbe, est aussi l'un des fondateurs de l'Académie Française, le premier nommé sur la liste de 1634. Ce qui ne l'empêche pas de courtiser les Bellinde, Philis et Cléonice, ni de s'éprendre de la Belle Lionne, Angélique Paulet.
Brusquement, le voilà évêque, exilé dans le lointain désert provençal de Grasse, puis de Vence. Prélat exemplaire, forçant l'admiration par son oeuvre apostolique, par son humilité et par son franc parler, il n'oublie pas ses amis parisiens, Chapelain, Conrart ou Mlle de Scudéry, il reste en contact avec la vie littéraire. Et il écrit beaucoup : ouvrages de spiritualité, d'histoire religieuse, poésies sacrées. Orateur énergique, auteur d'une épopée, il est l'un des grands poètes chrétiens de son siècle. Sa Paraphrase des Psaumes connaît un succès remarquable. « Ce qu'il y a eu de singulier en M. Godeau, c'est qu'il a su joindre la piété à l'amour des lettres. Il ne voulut pas estudier pour devenir savant, mais pour estre meilleur. »
De la galanterie à la sainteté : l'itinéraire est peu commun pour un Académicien. C'est cette carrière qu'ont scrutée, au cours du colloque organisé à Grasse en 1972, pour le tricentenaire de la mort de Godeau, une vingtaine de dix-septiémistes en cherchant à rappeler l'attention sur cet esprit délié, cette figure attachante et cet écrivain estimable.