Charles Dufresny, « Sieur de la Rivière », fut d'abord un personnage, quoique son origine mystérieuse et romanesque, sa vie d'aventurier sédentaire et une capucinade finale n'expliquent pas toute l'existence de ce bourgeois du Marais né d'une famille de petits officiers de Cour. Joueur, inventeur et homme d'esprit cultivant l'originalité parfois avec entêtement, Dufresny rejoignit, quand il se mêla d'écrire aux abords de l'âge mûr, la coterie formée autour de La Motte et de Fontenelle. Ce monde encore mal étudié donne le ton et la chaîne secrête du livre que François Moureau consacre à l'œuvre dramatique de Dufresny.
Principal fournisseur de la Comédie-Italienne entre 1692 et 1697, débutant, en même temps, à la Comédie-Française pour y poursuivre une carrière médiocrement heureuse jusqu'à sa mort, Dufresny a eu l'ambition de ne pas être un simple successeur de Molière. Son théâtre, d'une grande variété, annonce aussi bien l'opéra-comique que le drame bourgeois ; il est, à côté d'œuvres plus conventionnelles, un laboratoire dramaturgique exceptionnel.
Classé parmi les minores qui avaient trop de talent pour être méprisés et pas assez d'œuvres achevées pour convaincre de leur génie, embarrassé de voisinages prestigieux, Dufresny méritait qu'on essayât de lui donner la place qui lui est due dans ces décennies où se préparaient les Lumières.