Dans quelle mesure les philosophes et théologiens travaillant à Paris aux XIIIe et XIVe siècles étaient-ils libres d'exprimer leurs propres idées? L'essor de l’Université et la naissance des Ordres religieux ont-ils favorisé un contrôle doctrinal? Quelle est la signification et la portée des différentes formes de censure universitaire? De quelle manière ont-elles entravé la confrontation des opinions et orienté le mouvement des idées? Est-il possible de déceler, dans la production littéraire des penseurs scolastiques, des traces de leur crainte d’être persécutés en raison de leurs opinions? Avaient-ils une quelconque conscience du rapport entre liberté de pensée et progrès du savoir?
Pour répondre à ces questions, souvent éludées ou ignorées, ce livre propose de relire plusieurs interventions disciplinaires et doctrinales des autorités religieuses et académiques: les interdictions relatives à l’enseignement d’Aristote de 1210, 1215 et 1231 les statuts de la Faculté des arts de 1255 et 1272la retentissante "condamnation" du 7 mars 1277la campagne anti-ockhamiste des années 1339-1346. Examinant en détail les multiples instruments mis au point pour discipliner les activités intellectuelles, la production et la circulation des livres et des idées, on montre que la censure est un des facteurs, et non des moindres, qui ont conditionné le développement de la pensée médiévale.