Voici l'aventurier de Venise qui rentre au bercail, le voici au soir de la vie aux prises avec ses derniers démons: ses désirs, son identité et... la jeune Marcolina. Épisode possible de la carrière finissante du plus grand séducteur que l'Histoire ait connu, ce récit d'Arthur Schnitzler apparaît aux amants d'aujourd'hui comme un conte voltairien auquel Freud aurait prêté sa plume.
Pour Arthur Schnitzler, l'un des premiers écrivains influencés par la psychanalyse, et que Freud préféra éviter « de crainte de rencontrer mon double », Casanova est un sujet béni. En jouant à merveille avec les variations entre être et apparence, impulsion et réflexion, l'écrivain viennois rend compte des puissantes contradictions de l'âme de l'hédoniste. En invitant un libre-penseur à la table des nantis, il ridiculise les mœurs bourgeoises. Et cette tonalité teintée d'impressionnisme qui baigne chaque page exerce un mystérieux pouvoir : celui de décortiquer le ressort dramatique sans pour autant forcer la main à son dénouement.
Le Matricule des Anges.
Fils d'un professeur de médecine, Arthur Schnitzler, né à Vienne en 1862, devenu médecin à son tour dut attendre la mort de son père pour se livrer entièrement à l'écriture. Il conquit le public des théâtres avec ses pièces en un acte où il traite crûment des relations amoureuses (La Ronde). Chef de la "jeune Vienne" aux côtés de ses amis Stefan Zweig et Hofmannsthal, il excelle surtout dans la nouvelle ou le roman court (Mourir, Mademoiselle Else). Sa connaissance de la psychanalyse lui permet d'explorer le subconscient de ses personnages comme dans sa célèbre Traumnovelle. Son érotisme et son opposition à l'antisémitisme l'exposèrent à la controverse. Décédé en 1931, il est désormais considéré, avec Musil, Svevo ou Proust, comme l'un des maîtres de la littérature de la première moitié du XXe siècle.