Initialement conçu, entre 1930 et 1932, comme une contribution de l'Institut für Sozialforschung, dirigé par Max Horkheimer, aux débats de politique criminelle de la République de Weimar, " Peine et structure sociale " fut le premier ouvrage publié par l'École de Francfort dans son exil américain, en 1939. Redécouvert à la fin des années 1960, il est devenu un classique pour tous ceux, sociologues et historiens, qui s'intéressent à la question " pourquoi et comment punir ? ". C'est aussi une des rares références mentionnées par Michel Foucault dans " Surveiller et punir ". Le voici traduit en français pour la première fois. Réédité en 1967 aux États-Unis, " Peine et structure sociale " a ensuite connu des éditions en allemand, en italien et en espagnol. La présente édition, réalisée par René Lévy et Hartwig Zander, s'appuie sur des sources nouvelles qui éclairent la genèse de l'ouvrage et les parts respectives qu'y ont prises Georg Rusche et Otto Kirchheimer. Elle permet de mieux apprécier combien les circonstances particulières de l'exil ont marqué les différents moments de l'écriture de " Peine et structure sociale ". Peu de temps après sa parution, Max Horkheimer constatait, dans un essai sur " La théorie du criminel ", que " la peine de prison s'efface devant la réalité sociale ". Une époque disparaît, celle qui avait été caractérisée par les relations étroites entre le régime des peines et les mouvements socio-économiques. La prison et la peine privative de liberté sont devenues des institutions légales, mais avec l'essor de la société bourgeoise, le criminel, le crime et la peine se situent définitivement hors de la production. D'où ce paradoxe, situé au centre de " Peine et structure sociale " et de l'œuvre de Georg Rusche, que la prison et le système pénitentiaire moderne s'universalisent au moment où les bases économiques des peines s'effondrent. Cet ouvrage permet ainsi un autre regard sur la structure sociale : celui de la discipline et de " l'administration monopoliste de l'homme " (Max Horkheimer).