Pour Richard Sennett, l'artisanat désigne la tendance foncière de tout homme à soigner son travail et implique une lente acquisition de talents, où l'essentiel est de se concentrer sur sa tâche plutôt que sur soi-même. Des tailleurs de pierre de la Rome antique aux orfèvres de la Renaissance, des presses du Paris des Lumières aux fabriques du Londres industriel, l'artisan a toujours été un concepteur, et pas uniquement un exécutant. Étudiant les artisans modernes comme les développeurs de logiciels Open Source, notamment les spécialistes de Linux, le sociologue et historien montre qu'il existe une continuité entre la conception et la réalisation. Par là, il abolit les frontières entre la tête et la main, la pratique et la théorie, l'artisan et l'artiste, et prouve brillamment que « faire, c'est penser ».
Face au bouleversement actuel des formes de travail, l'artisan apparaît comme source et moteur d'une société où primeraient l'intérêt général et la coopération.
Ses essais, couronnés de multiples prix internationaux, ont imposé Richard Sennett comme une des figures les plus originales de la critique sociale. Ce que sait la main est le premier volet d'une trilogie consacrée à la « culture matérielle » parue, avec Ensemble (2014) et Bâtir et Habiter (2019), aux éditions Albin Michel.