Gilbert Simondon (1924-1989) a été considéré de son vivant comme un philosophe de la technique original mais difficile. Il s'impose aujourd’hui comme l’artisan d’un « nouvel encyclopédisme » qui veut unifier les sciences au sein d’une philosophie de la nature et renouveler l’humanisme.
Pour l’« ontologie génétique » de Simondon, toute chose tient sa réalité de la genèse où elle « s’individue ». Celle-ci est un processus ininterrompu auquel l’inerte, le vivant, le technique, le social, mais aussi le savoir et la pensée eux-mêmes appartiennent.
On expose ici la question de « l’individuation » dans ses trois dimensions essentielles – la différence entre le physique et le biologique, le « transindividuel », l’objet technique – pour montrer ensuite comment le génétisme de Simondon dépasse les oppositions classiques entre matière et forme ou sujet et objet, mais aussi les antagonismes (par exemple entre technicisme et humanisme) qui se disputent la conception de la nature et de l’homme. On développe enfin l’enjeu politique et social d’une philosophie pour laquelle une véritable « culture technique » pourrait supprimer une des principales causes de l’aliénation humaine et donner aux hommes les moyens de comprendre leur monde.
Jean-Hugues Barthélémy, directeur du CIDES (MSH Paris-Nord/ Fondation « pour la science »), éditeur et directeur des Cahiers Simondon, est l’auteur de Penser l’individuation. Simondon et la philosophie de la nature (Paris, 2005), Penser la connaissance et la technique après Simondon (Paris, 2005) et Simondon ou l’encyclopédisme génétique (Paris, 2008).