Martin Buber termine un des chapitres du Chemin de l'homme par cette anecdote :
Rabbi Enokh racontait : « Il y avait une fois un sot si insensé qu’on l’avait surnommé le Golem. Chaque matin, au lever, c’était pour lui tout un problème de retrouver ses vêtements, une tâche véritablement si ardue pour sa pauvre tête qu’il en hésitait, le soir, à se déshabiller pour se coucher. Mais voilà qu’un soir, prenant son courage à deux mains, il s’empara d’un crayon et d’un bout de papier sur lequel il consigna l’emplacement de chacune des parties de son vêtement qu’il quittait.
Au matin, tout joyeux, il se leva et prit la liste : "la casquette – ici", et il s’en coiffa ; “le pantalon – là”, et il l’enfila, et ainsi de suite jusqu’à ce qu’il eût tout revêtu. “Oui, mais moi-même, où suis-je donc ?” se demanda-t-il soudain, tout anxieux, “où suis-je donc passé ?” Et ce fut en vain qu’il se chercha et qu’il fouilla partout : il n’arriva pas à se retrouver. Ainsi de nous », dit le Rabbi.
Les trois textes réunis ici sont tous animés par le souci d’éveiller le lecteur à son humanité, une humanité qui ne va pas de soi, et qui ne se trouve qu’en cheminant. Martin Buber nous guide sur ce chemin.
Martin Buber (1878-1965) est considéré comme l’initiateur de la philosophie juive moderne. Il a consacré la plus grande partie de sa vie à recueillir et à traduire les récits, les légendes et les chroniques hassidiques. Deux autres textes importants, Les Récits hassidiques et La Légende du Ball-Shem ont également été traduits en français. Léon Chestov, Robert Misrahi ou encore Théodore Dreyfus lui ont consacré des biographies intellectuelles.