Le monde occidental s'interroge aujourd'hui sur la passion de la mort qui pousse de jeunes terroristes au suicide et au crime. Le présent essai traite d'une autre fascination, non moins troublante : celle qui travaille sourdement les grands textes de notre modernité. Après Alexandre Kojève, l'écriture de Georges Bataille, de Maurice Blanchot, de Jacques Derrida ou de Jacques Lacan, laisse transparaître un lyrisme de la destruction, un engouement pour l'abîme, qu'il faut savoir reconnaître sous la rigueur de la pensée.
D'où vient cette esthétique du malheur ? Quels enjeux recouvre-t-elle ? Au fil d'une minutieuse lecture, l'auteur s'attache à dénuder un complexe de valeurs et d'affects qui remontent aux origines symboliques de notre civilisation. On entrevoit peu à peu que cette revendication de la mort pourrait bien n'être que le signe inversé de la grande protestation humaine, de sa soif d'infini et de son désir d'être.
Betty Rojtman, née à Paris, a dirigé le département de littérature française à l'université hébraïque de Jérusalem. Elle situe sa recherche au carrefour de la pensée contemporaine et de l'exégèse juive traditionnelle. Parmi ses publications : Feu noir sur feu blanc. Essai sur l'herméneutique juive (1986); Une grave distraction (préface de Paul Ricoeur, 1991) ; Une rencontre improbable (2002) et Moïse, prophète des nostalgies (2007).