Le Satiricon, on le sait, décrit les vagabondages de trois jeunes viveurs au temps de Néron. Encolpe a été frappé d'impuissance par le dieu Priape qui n'a pas ménagé ses largesses à son ami Ascylte, étymologiquement "l'Infatigable". En compagnie du jeune Giton dont la grâce adolescente éveille plus de convoitise, ils nous font découvrir les extravagances d'une humanité menée par le plaisir, vivant chaque jour comme s'il devait être le dernier. Mais l'élégant épicurisme de Pétrone, probable familier du Prince, arbitre de ses plaisirs avouables, préserve cette fête sensuelle de la démesure et fait de cette oeuvre énigmatique en dépit de sa notoriété le premier vrai roman de la tradition occidentale.
Il y a des oeuvres qui sont des clairières...Les clairières de Watteau s'ouvrent pour les départs nostalgiques et tendres, la clairière de Pétrone sur une libération volontiers crue, mais celle-ci et celle-là nous parlent d'une vie plus vraie qui rend putride notre vie officielle, et que nous avons à regretter, à sauvegarder ou à conquérir.- Henry de Montherlant