Quels soins donne-t-on à un malade qui va mourir ? Et que dit-on que l'on fait ? Que dit-il, lui, qui est placé dans l'incertitude profonde de son sort ? L'entend-on ? Comment l'entendre ? Et que lui répondre ? Bien souvent les questions qui se posent à l'approche de la mort sont laissées au non-dit. Et les silences se creusent entre pudeur et impuissance, respect et fuite, compréhension et angoisse.
Pour briser le silence, sans imposer un discours, ce livre manifeste une attention originale: en donnant largement la parole aux soignants et aux malades, il rappelle inlassablement la dissymétrie de leurs situations, insurmontable par principe. Mais ce faisant, il interroge ce qui se dit de part et d'autre, libérant ainsi une autre voie, celle de l'écoute comme possibilité et foyer de relations porteuses de sens.
De ces rapprochements de paroles et des multiples hésitations des soignants à définir leurs actes et leurs objectifs, il ressort que la mission même de la médecine demande à être repensée afin de fonder une « médecine de l'incurable », appelée à orienter la prise en charge d'un nombre grandissant de patients âgés ou malades chroniques pour lesquels la médecine n'a pas de certitude ou n'a plus d'espoir de guérison.
Un livre inhabituel donc, et d'autant plus nécessaire pour tous les acteurs du soin, à la fois immergés dans le pragmatisme de leur travail et confrontés à l'intime d'une existence unique exposée à l'épreuve abyssale de sa mort.