Si l’on connaît, à travers ses écrits sur Proust, Blanchot, Celan, l’intérêt qu’Emmanuel Levinas portait à la littérature, on ne soupçonnait peut-être pas, chez lui, l’existence d’une telle "pratique littéraire".
Or, c’est ce que mettent en évidence les ébauches de roman (Eros ou Triple opulence et La Dame de chez Wepler), les notes et les poèmes qui composent ce nouveau volume d’inédits magnifiquement préfacés par Jean-Luc Nancy
Ainsi, bien que Levinas ne soit jamais devenu à proprement parler écrivain, la passion littéraire a toujours été intimement mêlée à son projet philosophique. Levinas a vu dans la littérature le lieu peut-être le plus propre à la présentation de l’intrigue de l’autre et du rapport, de l’approche et du contact.
Ecrits dès le début des années 1920, ces inédits nous font accéder à la genèse de l’œuvre du grand philosophe. Ainsi de ces émouvants poèmes de jeunesse, rédigés en russe, en yiddish et en hébreu, alors que Levinas n’a qu’une quinzaine d’années. Ou, plus tard, ses deux esquisses de roman, qui témoignent sur le mode fictionnel de son expérience de la guerre.
Levinas n’a pas été plus loin dans ses tentatives littéraires, mais le mouvement qui les portait n’a pas pour autant été effacé.