Cet ouvrage, Plantu, 50 ans de dessin, offre une rétrospective unique dans l’atelier de l’artiste. On y reconnaîtra sa manière bien à lui d’attraper ses « bons clients » – Mitterrand en danseur de hip-hop, Sarkozy et sa coupe au rasoir, Hollande en concombre –, tout le bestiaire politique qui a marqué la vie publique depuis un demi-siècle. Le caricaturiste du Monde nous ouvre aussi en grand les portes de ses enfers : ses dessins inédits, ses dessins interdits, censurés ou publiés au milieu des polémiques et des tensions, sur le confl it israélo-palestinien, les guerres des Balkans ou les représentations de Mahomet.
Dans ces pages intenses, Jean Plantu se raconte sans détour à Éric Fottorino pour dire ce qui fait penser son crayon. Ce qui l’énerve, ce qui l’indigne. Qu’il aborde ses débuts, ses combats contre l’intolérance et les excès de tous bords, son travail sur le Proche-Orient ou ses engagements au sein de sa fondation Cartooning for Peace, Plantu est toujours le même : entier, sincère, provocateur mais pas trop, à la limite de ce qu’il s’autorise pour pratiquer cet exercice à haut risque qu’il appelle le « dérapage contrôlé ». Un mélange de liberté et de responsabilité.
À travers quelques thèmes de prédilection qui sont autant de questions graves – comment dessiner après Charlie, comment Internet fait-il de la planche du dessinateur un terrain miné, comment expliquer au public français ou étranger jusqu’où il peut aller sans humilier –, Plantu offre un témoignage rare et exceptionnel sur son art chaque matin recommencé. À l’occasion de l’exposition « Plantu, 50 ans de dessin de presse » organisée par la BnF en mars 2018, ce marathonien du trait livre au passage un enseignement sur sa manière de dessiner, sur les chemins parfois inattendus qu’empruntent sa mine et sa pensée pour susciter le rire, le sourire, l’indignation, le malaise, et toujours la réflexion.