Longtemps ses adversaires en ont rêvé – à moins que ce ne soit l’inverse. Il l’a fait. Patrick Besson, qui passe pour l’un des hérauts de la passion dite proserbe, a constitué lui-même le dossier qui l’accable. Chef d’inculpation : défenseur d’une cause indéfendable. Composition : par ordre chronologique, tous les textes, chroniques, relations de voyage en Serbie ou en Bosnie, poèmes, discours, écrits produits pendant les guerres en ex-Yougoslavie, de 1995 à 1999, du conflit en Bosnie à celui au Kosovo.
Confrontés aux pièces ici rassemblées, plus de quinze ans après les faits, il n’est pas exclu que les accusateurs en viennent à réviser leur jugement... Car, il faut bien le dire, en 1995, Patrick Besson était entré à reculons dans la bataille des bonnes consciences médiatiques, qui déjà faisait fureur. « L’ennui avec les bons sentiments, c’est qu’ils conduisent tout droit aux mauvais », avait-il noté, d’emblée, un sourire goguenard entre les lignes. Avec les années, il ne se départit pas de ce détachement ironique – c’est peut-être là sa faute la plus grave –, mais ne cessa de monter de plusieurs crans dans le grinçant. C’est que cette guerre, si affreuse, a d’abord été une guerre d’écrivains (tous les protagonistes croates, serbes, bosniaques avaient eu des prétentions littéraires, à commencer par Miloševic), qu’il n’y en a pas de pire, et qu’elle s’était prolongée par des guerres d’écrivains à Saint-Germain-des-Prés.