Bien avant que ne s’ouvre le débat sur la « crise de l’art contemporain », Castoriadis avait posé avec une acuité particulière la question du sens et de l’avenir de la création artistique. Son diagnostic était sombre : l’effondrement de cette création au présent obère également le passé et l’avenir : le passé, car « là où il n’y a pas de présent, il n’y a pas davantage de passé » ; l’avenir, car « mémoire vivante du passé et projet d’un avenir valorisé disparaissent ensemble ». Rien, dans ce dernier quart de siècle, n’est malheureusement venu infirmer ce diagnostic. Plusieurs textes inclus dans ce recueil (sur la musique, sur la fonction de la critique, sur l’art comme « fenêtre sur le chaos ») prolongent les réflexions de l’auteur sur les rapports entre la création culturelle, la société démocratique et l'énigme de l’œuvre d’art.
Cornelius Castoriadis(1922-1997) s’installa en France en 1945, après des études de philosophie, d’économie et de droit à Athènes. Cofondateur du groupe et de la revue Socialisme ou Barbarie (1949-1965), économiste à l’OCDE (1948-1970), directeur d’études à l’EHESS (1980-1995), psychanalyste (1973-1997). Il a publié au Seuil L’Institution imaginaire de la société (1975) et six volumes (dont un posthume) des Carrefours du labyrinthe (1979-1999), ainsi que le recueil Une société à la dérive (2005). Ses séminaires de l’EHESS sont en cours de publication au Seuil : Sur Le Politique de Platon (1999), Sujet et vérité dans le monde social-historique (2002), Ce qui fait la Grèce, 1 : d’Homère à Héraclite (2004).