C'est la plus cruelle des réalités qui est dite ici : que Suzanne Klein a perdu il y a un an son fils unique alors âgé de vingt ans. C'est cette atroce douleur qui la tient encore debout, c'est avec elle qu'au cours d'une tournée de conférences aux États-Unis elle atterrit à La Nouvelle-Orléans, avec elle encore qu'elle se retrouve inopinément, à la suite d'un rendez-vous qu'elle a volontairement manqué à l'aéroport, femme de ménage chez Élise Brac, son mari et ses deux enfants.
Sans papiers, sans passé avouable et sous un nom d'emprunt, elle sera désormais Noémie Rosencrantz, ultime maillon de la chaîne du désespoir humain, à la fois héroïne tragique et narratrice silencieuse, occupée à commenter pour elle-même, mais jour et nuit, la mort de son enfant. Femme solitaire et travailleuse clandestine, mère qui ne l'est plus, elle se livre à l'éducation de La poussière - qui est comme une psalmodie de l'absence - et à ce qu'elle appelle « la loi cannibale de la douleur ».