Fait et à faire
Les carrefours du labyrinthe 5
« Ni fait ni à faire », disaient autrefois les dames bourgeoises du travail de leurs bonnes quand elles en étaient mécontentes. Fait et à faire pourrait être le sous-titre de tout travail philosophique digne de ce nom.
Nous ne philosophons pas pour sauver la révolution, mais notre pensée et notre cohérence. La philosophie est la prise en charge de la totalité du pensable – et il nous faut penser ce que nous faisons. La voie de la philosophie s’ouvre nécessairement lorsqu’on réfléchit aux sciences et à leur histoire. Mais plus encore la réflexion du social-historique et du psychique est philosophiquement privilégiée. Société, histoire, psyché ne sont pas des conditions extérieures et triviales de la philosophie. Elles lui fournissent l’ élément de son existence et, surtout, elles s’expriment dans la philosophie. Car la philosophie, création de significations, est œuvre de l’imaginaire des sociétés et de l’imagination des êtres humains singuliers.
Cornelius Castoriadis (1922-1997)
Arrivé en France en 1945. Cofondateur et animateur du groupe et de la revue Socialisme ou Barbarie (1949-1965), ses écrits de cette période ont été réédités dans la collection « 10/18 » (1973-1979). Économiste à l’OCDE (1948-1970), psychanalyste (1973-1997), directeur d’études à l’EHESS (1980-1995), il a publié au Seuil L’Institution imaginaire de la société (1975), six volumes (dont un posthume) des Carrefours du labyrinthe (1979-1999) ainsi que les recueils Une société à la dérive (2005) et Fenêtre sur le chaos (2007). Ses séminaires de l’EHESS sont en cours de publication au Seuil: Sur Le Politique de Platon (1999), Sujet et vérité dans le monde social-historique (2002), Ce qui fait la Grèce, 1. D’Homère à Héraclite (2004), Ce qui fait la Grèce, 2. La Cité et les lois (2008).