Frontière décisive de l'oeuvre, seuil à double sens entre le monde et le texte, instant fatidique de rencontre des désirs de l'écrivain et des attentes du lecteur, l'incipit romanesque - «lieu littéraire par excellence», selon Italo Calvino - est une question cruciale dans la critique contemporaine, dont les contours restent cependant flous en l'absence d'une analyse globale.
Cet ouvrage propose une réflexion systématique sur le sujet. Il esquisse d'abord une poétique générale du commencement fondée sur l'analyse de son statut et de ses fonctions; il décrit ensuite les transformations de ses modèles dans l'histoire du roman moderne, avec une attention toute particulière portée à l'oeuvre de Balzac.
Au coeur de cette interrogation théorique se trouve la difficulté stratégique de l'incipit: à la fois lieu d'orientation et de perdition, le commencement est un piège qui envoûte le lecteur par l'attraction sensuelle de l'écriture, par le pouvoir stupéfiant de la parole romanesque, par l'incessante recherche d'une différence. Tel est le sens ultime de la réflexion ici présentée: saisir cette insaisissable séduction du commencement.